Tempêtes dans une tasse de thé
L'été de Charmes en l'Angle aura, dans tous les sens du terme, été chaud. Très chaud.
L'été a été, oui, et qui bientôt ne sera plus...
Mais revenons aux agitations qui ont secoué notre microcosme ces dernières semaines. La saison fut riche en événements, le moins important n'étant pas l'inauguration du bistro installée dans la sellerie ; eh oui, de chevaux point en la demeure, hélas ! mais de bonnes bouteilles de toutes sortes, oui ; alors adaptons les lieux aux singularités de ce pays-ci.
A deux reprises l'orangerie, aux ordonnancements à géométrie variable selon l'occasion, a revêtu ses atours de fête, premièrement en la fin du mois de juillet pour célébrer l'échéance annuelle qui déplace inexorablement le curseur qui accompagne ma vie vers son accomplissement.
Je ne vous infligerai pas le compte rendu d'un rituel somme toute banal et dont le seul intérêt est celui du jeu des affections qui le colorent et qui s'il ne se dit pas se goûte.
Simple remarque, au fil des conversations, je remarque l'état de détachement des jeunes générations dont le regard semble toujours dirigé vers l'horizon, réduisant le cadre et le contexte au détail fugace, tandis que les anciens, eux, savourent le moment vécu avec la gourmandise de ceux qui savent l'impermanence de toute chose, non je ne vous resservirai pas de nouveau le fameux carpe diem... pas chaque fois tout de même.
Puis, à la mi-août, nous avons célébré notre désormais traditionnelle messe annuelle avec toujours le même bonheur du partage entre voisins, famille et amis, venus, pour certains de très loin, tout spécialement pour la circonstance.
Pendant quelques jours, la grande maison, pleine avait tout d'une ruche vibrionnante, le ballet frénétique des poêles, marmites et casseroles orchestrait gaiement les réunions autour de grandes tablées.
Jamais la maison ne fut autant en désordre et je dois avouer que l'adaptation à ce cas de figure du pêle-mêle est un exercice hautement formateur pour le maniaque que je suis.
Enfin, la messe eut lieu et peu à peu la demeure se vidait ; un semblant de sérénité et d'ordre semblait se dessiner jusqu'à ce que l'arrivée de nos chers peintres venus de Stuttgart pour rénover un couloir de service mette une fois encore la maison sens dessus-dessous et poudrant de surcroît les pièces d'un nuage de plâtre des plus séduisants. Mais le résultat, fort satisfaisant, nous dédommage amplement de ces peines et nous remercions nos industrieux amis.
Mais ceci est une autre histoire, car de tempêtes je vous appâtai et voila que nous nous attardons sur les pulsations métronomiques d'une grande maison à l'époque des vacances.
Eh bien voila, venons-en au fait :
A la sortie de la cérémonie nous constatons avec surprise que le cimetière, le pauvre petit cimetière dont seules deux tombes sur la dizaine qui ont échappé à la pelleteuse des perpétuités réduites aux incuries, sont entretenues régulièrement, a été vandalisé, oui, oui, vandalisé : une couronne de fleurs en céramique et plusieurs crucifix ont été cassés en mille morceaux et jetés dans le "pré aux veaux" que surplombe le lieu d'un repos soudainement de principe seulement.
Je ne pense pas que l'on puisse parler de profanation et j'aurai tendance à voir dans cet acte aussi gratuit que stupide le masque de l'ennui d'une certaine adolescence des alentours qui se donne les frissons qu'elle peut avec les postures de mini-rebellions "gothiques" dont certaines revues en mal de sensationnel, se font l'écho ; manifestation de la crétinerie ordinaire...
Évidemment, Monsieur le Maire, porte-parole de l'indignation des braves gens, que je partage au demeurant, a porté plainte auprès des services compétents (Oh la la, la belle tournure toute de solennité !).
Nous avons donc eu droit aux honneurs de la visite de la maréchaussée qui a "main-couranté" l'horrible méfait, de celle d'un journaliste dont la plume éloquente a donné le retentissement adéquat à l'acte ignoble, et enfin, acmé de la notoriété toute nouvelle de notre commune, la venue de Monseigneur l'Evêque de Langres, qui, amène, courtois et spirituel, exprima en notre humble salon une tristesse que la presse relaya dès le lendemain.
Mais n'allez surtout pas croire, cher lecteur, que l'auréole de gloire de la plus petite commune de Haute Marne, se borne au constat des actes de malveillance ; effectivement, notre Clochemerle a le bonheur d'abriter, pour la saison des vacances, notre voisine et amie Sloane, native de Charmes mais exilée à l'île Maurice et dont la ravissante blondeur, à faire pâlir de jalousie les blés mûrs des champs d'avant-moisson, se rit aux éclats et sans aucune nostalgie, du temps où elle arpentait les podiums ; le Journal de la Haute Marne a tenu à lui rendre hommage.
Mais, vous allez le constater, et je m'en faisais l'écho il y a un an, une autre blonde, moins délicate "fait la une" de la presse nationale et met en émoi les médias lors de sa "rentrée politique" dans l'apothéose du culte que lui voue le village voisin, le désormais tristement célèbre Brachay.
Vous l'avez deviné, l'égérie dont le portrait photoshoppé est distribué ad libitum en offrant l'image lisse et étonnamment rajeunie, n'est pas la blonde mousseuse dont la réclame s'accroche aux murs de ma désormais célèbre sellerie même si elle aussi, veuillez cliquer sur la deuxième photographie pour le constater dans l'agrandissement, pointe à Bruxelles.
Oui, bien sûr, il s'agit du pèlerinage annuel de Madame Marine Le Pen en son fief ; d'ailleurs ma charmante boulangère, qui livra hier trois-cents baguettes à Brachay, m'a fait part de l'élégance de la dame, bien plus belle que Ségolène Royal, dans son joli pantalon blanc...
Ne nourrissant aucune flamme pour celle qui se prenant pour la nouvelle Jeanne d'Arc, les mériterait cependant pour parfaire la glorieuse identification, je tournai mon efficace et écologique destructeur de mauvaises herbes thermique vers les pavés des communs encombrés de ces disgracieuses indésirables ; cependant, peut-être pour me rejouer subliminalement le fameux film de Jean Chapot Les granges brûlées, je m'approchai d'un peu trop près d'un grand portail avec pour conséquence le beau gâchis que vous voyez là.
Mais cet événement insignifiant n'a pas exacerbé la verve des plumitifs locaux.
Bon, cela dit, et là est l'essentiel, jamais, dans la serre, les zinnias ne furent aussi beaux.