Mai des amours, de terre et des fleurs

Mai d'amour

Cette fin d'avril à Marrakech, les émois des félins qui hantent les toits nous disaient l'approche du beau mai ; mai est dit-on le mois des amours et à l'heure apéritive sur la terrasse, alors que le soleil déclinait et que la mélopée des muezzins enveloppaient la ville, cela nous fut conté par la superbe irrévérencieuse d'un matou faisant le guet, fièrement campé sur le pan de mur le plus haut du voisinage.
Je soupçonne le réseau électrique tout proche de s'être trouvé de faible voltage eu égard aux frémissements névrotiques qui parcouraient l'échine de l'agile animal.

Les chats ont-ils un agenda intégré dans le mystère de leurs savoirs insondables ? J'en jurerais presque au vu de la courte attente qui couronna de succès le rendez-vous amoureux, une femelle cauteleuse et gracieuse s'avançait à pas comptés vers le galant qui consentit à descendre au niveau de la crête sur laquelle cheminait la belle. La demoiselle, jalouse de sa renommée, ayant jugé qu'elle s'était suffisamment compromise, s'assit les yeux pudiquement baissés à une distance convenable laissant l'enamouré s'approcher et déposer un baiser sur son front.
Le manteau complice de la nuit couvrit le reste d'une histoire dont nous ne pourrons que supposer une fin vieille comme le monde.

Mai de terre

Un temps propice aux plantations ayant succédé aux déluges, Charles le jardinier a pu délaisser ses recherches grimoiro-généalogiques pour s'adonner enfin aux travaux de la terre qu'il affectionne au point de s'échiner en toute allégresse, sort qui ne m'est pas dévolu tant j'ai en horreur les contacts sombres, froids et humides, bref du monde chthonien.
J'ai cependant activement participé à la mise en place d'un tunnel qui préservera les tomates de ce damné  mildiou qui les décime régulièrement depuis quelques années de pluies inopportunes dès qu'elles arrivent à maturité. Aussitôt dressé l'habitacle a dûment été planté, admirez l' ordonnancement tout militaire des plants...

Ainsi, avec la participation de l'ami Bruno, entre désherbages, semis et plantations, alternant avec des pauses gourmandes, le temps s'écoule selon les rythmes immuables de la vie à la campagne, heureusement une opportune session de cours à Paris m'a tenu à l'écart le temps du désherbage des graviers.
Dans la serre, les jasmins embaument de leur fragrance tellement entêtante qu'on hésite à les respirer, entre délice et écoeurement ; on dilate les narines les yeux fermés pour mieux se laisser envahir par l'arôme capiteux et suave, et, soudain, comme après un excès de pâtisserie nous voila au bord du dégoût, on prend alors de la distance pour capituler aussitôt devant l'appel du fascinant poison.

Mai des fleurs

Mêles aux fleurs de saison, nous retrouvons les jasmins en ces "bouquets de grand-mère" qui sont un peu la marque de la maison aux beaux jours, il en ira ainsi jusqu'à l'ultime floraison des hortensias qui sécheront avec élégance et continueront à garnir, délicates momies, les vases de fleurs tout au long de l'hiver.

Les dernières pâquerettes s'attardent encore dans les herbes humides du tour de l'étang mais violettes et primevères ont déja fait leurs adieux, la nature est ivre et reprend avec frénésie ses droits, ainsi, venue d'on ne sait où, une graine de pensée a élu domicile au milieu du gravier pour nous offrir la profonde nuance de son velours violet, elle sera bien sûr épargnée ; le hêtre pourpre il n'y a guère encore paré d'un feuillage rose ocré se coagule en vibrations de grenat ; le soir le soleil couchant dore les nuages en un somptueux adieu à cette journée de printemps.

En allant fermer le Pavillon des T avant un nouveau départ vers Marrakech, se détachant sur le mur de laque rouge le dragon semble cracher le feu des touffeurs qui nous attendent ; pari tenu, ici, dans la cité rouge Mai se meurt étouffé par les ardeurs d'un soleil estival.

Comments

[Henri-Pierre]

@ Nicolas B : Vu Nicolas, je te rendrai visite, t'ai mis dans mes liens

[Nicolas Bleusher]

Salut HP !

Hé bien si, mon site est ouvert : https://nicolasbleusher.wordpress.com

Je réécris un peu en ce moment.

Bonne continuation.

[Henri-Pierre]

@ Jeanne : Merci de cette douceur avec laquelle moi aussi je t'embrasse.

[jeanne]

je crois ( je crois)

que c'est au mois de mais qu'il y a le plus de mariage ...

un mois prometteur tout azimut ???

ici il est doux.t'embrasse.

[Henri-Pierre]

@ jean-X : Oui cher ami, parfois la vie qui es tout sauf hasard se plaît à "arranger" les choses à coups d'évidences impromptues, je sais que nous avons en partage le goût de ces conjonctions de ces co-incidences.

Oui, j'aime aussi cet ordre souterrain sous les désordres apparents.

Merci de ton passage et de ton commentaire si bien ressenti et de cautionner cette avancée d'un été attendu; Que les jours à venir t'apportent plein de joies.