Spiritualités et mômeries
Nous sommes, nous, Européens, en rupture avec nos sources depuis que la Raison s'est imposée de façon totalitaire à la Perception, à la Croyance et donc, aux symboles fondateurs de notre civilisation..
Si, poussivement et scolairement, tout le monde connaît la mythologie gréco-romaine, Egyptienne et voire Mésopotamienne, pour qui est encore vivant le message des figurations chrétiennes ?
Les religions à force de dogmes normatifs et de rites sclérosants se sont coupées de leurs forces vives et ont creusé elles mêmes les fosses de leur déssèchement.
Les lieux communs ont pris la place des quêtes spirituelles et les mômeries rituelles ont occulté les élans et les extases qui mettaient une part de divin en chaque homme.
Face à ce vide nous sommes allés chercher ailleurs ce que notre culture nous offrait et que les pouvoirs ont enseveli.
Qui sait encore que le dépouillement des vanités bouddhistes était de notre essence avec saint Jean de la Croix et autres stylites ?
Qui, en quête de liens avec les manifestations de vies autres qu'humaines, connaît encore les communications "chamaniques" de Saint François d'Assise ?
Les extases de Saint Thérèse d'Avila trouvent leurs échos dans les transes des derviches tourneurs et les hallucinations amazoniennes.
Les exemples sont nombreux qui témoignent de l'abandon de nos sources et de la nécessité schizophrénique d'aller chercher ailleurs ce que nous avons occulté et aboli chez nous.
D'aucuns ont raillé le symbole christique d'une nudité souffrante et suppliciée, cela est facile, il l'est moins de voir dans chaque épine la souffrance qu'implique la part de douleur des autres que l'on prend à son compte dans le renoncement à tout égoïsme.
L'amour total, l'amour oblatif, ce seul chemin de la richesse de soi par les abandons du superflu n'est plus de mise.
L'acceptation des clous qui maintiennent les bras en état d'ouverture aux autres est indécent dans le monde de l'individualisme et des rentabilités, des "pay back".
Si les religions étaient restées dans leur essence au lieu de s'encanailler avec les pouvoirs peut être n'en serions nous pas là.
Les religions meurent de ne plus être rebelles, les panses replètes des frères Tuck ont anéanti la fébrilité incandescente des regards vers l'insondable.
Je ne suis pas arc bouté sur mon déterminisme chrétien, je ne sais ni ce que je crois ni ce qu'il me conviendrait de croire mais je déplore que les moteurs de l'interrogation spirituelle aient été éradiqués du fonctionnement de nos cultures occidentales.
Est-ce un hasard si c'est juste maintenant que j'ai retrouvé, grâce à la toile, des livres de mon enfance enfuis des librairies ?
Voici ces chefs d'oeuvre que je vais re-dévorer.
Tous les trois, parlent de l'abandon des paraîtres dans la quête de l'essentiel, caractéristiques d'un certain mysticisme allemand héritier de Hölderling.
Tiens, au fait, si vous saviez où je peux encore me procurer L'agneau carnivore d'Agustin Gomez Arcos dites le moi, avant que sa quête promise à un ami cher ne me coûte le ressemelage de mes souliers.
Je confesse que, malgré ce que je viens de dire, je ne saurais aller nu-pieds...