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Le blog de HP
8 novembre 2012

Un autre Maroc

Maroc des dépliants touristiques, farnientes paresseux et grégaires des plages d'Agadir, dromadaires sur fond de dunes et palmeraies se découpant sur ponants incendiés... Oui, bien sûr, ici comme partout dans un monde aux distances de plus en plus rétrécies, les poncifs de cartes postales servent d'appeaux, selon le degré de fortune, au tourisme de masse ou aux nomades de luxe des plusieurs étoiles.
Dans les deux cas le pays, froissé de cette vue réductrice, se dérobe et ne donne rien, rien d'autre qu'une prestation facturée. On en a pour son argent, un point c'est tout.
Prenons la peine d'aborder un lieu, un pays, comme il est et non comme nous le désirons, ouvrons les yeux et l'esprit, et aussi, ou surtout, le coeur, et par des routes difficiles, en cette saison où pluies et soleil, chaleurs et fraîcheurs se succèdent et se télescopent, effectuons par des routes incertaines, la boucle Marrakech, Amizmiz, Lalla Takerkoust et, à un jet de pierre de la bruissante ville rouge, nous voici dans un monde sauvage et encore intact qui semble si lointain dans le temps et dans l'espace.
A une vingtaine de kilomètres de la capitale touristique, l'Atlas à la base duquel s'attardent paresseusement les strates brumeux de cette fin de matinée, s'offre avec l'intense et irréelle poésie d'un mirage.

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Un eucalyptus au feuillage mollement caressé par la fraîcheur attardée d'une brise qui se voudrait encore bise donne la mesure de l'immensité de cette étendue de terres en attente de la floraison du prochain printemps et des cultures à venir. Repos d'une gestation, la nature couve les richesses à venir ; encore plongées dans leurs rêves vaporeux, les habitations témoignent de cette parenthèse d'entre moissons, labours et semailles où l'homme peut enfin goûter quelque repos.
Les sommets tantôt émergent de la brume, tantôt, lorsqu'on atteint les vallées de montagne, se voilent de vapeurs irisées par l'astre qui s'apprête à s'imposer.
Disposées en terasse les cultures vivrières disent les activités immémoriales d'un temps arrêté et l'on se surprend à rêver d'une halte hors de nos turbulences et de nos obligations, comme si une sagesse inhérente à la terre nous tendait la coupe de l'oubli, nous entrebaillait la porte des accès aux accords profonds et réconciliateurs.

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L'habitat traditionnel aux terrasses herbeuses est construit de matériaux opportunistes, murs de pisé et, parfois,  soubassements de pierre ; seuls les minarets des mosquées qui émergent des brumes témoignent de l'introduction du béton dans les constructions récentes, quelques maisons aussi qui en "jettent plein la vue" à coup de balustres et de stucs mécaniques et qui sont le témoignage de la réussite marchande d'un berbère avisé qui, fortune faite après un long exil, veut épater les voisins de son lieu de naissance.
Mais heureusement ces caviardages indiscrets du paysage rural sont assez rares ici, les montagnards sont moins aventureux que leurs compatriotes du Souss et l'ensemble du paysage reste encore d'une émouvante innocence.
Les voies traversées d'oueds en crue et cabossées par les roches et les ravines des temps de pluies ne sont pas toujours praticables.

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La route revenue à l'état de piste, encaissée entre les parois rouges des reliefs éventrés, serpente sans fin avec pour horizon des monts couverts de résineux ou d'oliviers lorsque les flancs en sont plantés ; absorbés par la splendeur vierge du paysage, captivés par la sérénité pastorale des moutons rescapés de la grande fête sacrificatoire et qui paissent paisiblement inconscients du sort auquel ils sont promis, attendris par la délicatesse hésitante d'un ânon trottinant à l'ombre de sa mère, nous manquons l'embranchement qui devait nous amener sur les rives de la retenue où nous attend le déjeuner de salades et de grillades ; peu importe, la route encombrée de rocs qui ont dévalé des hauteurs devient impraticable nous obligeant à rebrousser chemin pour constater que le retour offre des facettes nouvelles aux beautés de l'aller.
Esprit incube, djin peut-être en ce pays de superstitions ancrées depuis toujours, un chien fauve et insolite aux allures de lycaon demeure royalement indifférent au passage de l'automobile.

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Nous voici enfin parvenus au terme du voyage, l'accueil que nous réservent nos restaurateurs habituels de cette halte sans prétention aucune est des plus chalereux mais bien plus réservé que celui de leur chat aux grâces languides, ivre de ronrons, quémandeur de caresses et qui, lorsque les brochettes seront servies, réclamera avec insistance sa part du festin.

 

07 nov 201 (60)

Franchis les remparts de la cité, le méli-mélo asphyxiant des mobylettes et des voitures au contrôle technique défaillant, les mulets épuisés par des charges impressionnantes, les ânes à la patience inébranlabe et les autocars brinquebalants, le tout sur un fond sonore de klaxons et d'interpellations exacerbées, nous ramène au quotidien agité de la grande ville. Vite, vite, rentrons à la maison prolonger encore un peu, à l'abri des bruits, la paix de cette incursion dans un monde préservé sûrement en sursis.

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Commentaires
H
@ : Verdinha : Oui, j'ai appris, merci d'avoir pensé à moi. Je suis très triste. Qu'elle continue à vivre en nos coeurs.
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V
Bonsoir,<br /> <br /> J'ai vu que vous vous inquiétiez de l'absence de Christina.<br /> <br /> J´ai le grand regret et la tristesse de vous dire qu'elle est partie doucement pour l'Eternité.<br /> <br /> J´étais son amie virtuelle qui est devenue réelle.<br /> <br /> Verdinha
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H
@ Gazou : Tu ne seras pas déçue, j'y vais régulièrement depuis si longtemps et toujours mon intérêt pour ce pays est aussi fort.
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G
Comme tu parles bien de ce pays...Je n'y ai fait que deux brefs séjours d'une semaine ...mais j'en garde un excellent souvenir et espère y retourner
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H
@ Jeanne : C'est qu'il faudrait ma chère Jeanne, avoir bien peu d'âme pour rester insensible à tout ce que ce pays peut offrir. Et tu as raison, ce pays, je l'aime profondément.
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