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Le blog de HP
15 décembre 2011

Hay tardes de otoño hechas de sol de Madrid

Il est des après-midi d'automne faits de soleil de Madrid...

Ainsi dit une chanson de mon enfance madrilène ayant pour théâtre le café "Platerias" où les illusions d'amour non partagé se noyaient dans le frou-frou de soie grise d'une belle coquette ; le lieu a disparu tout comme ce siècle qui se mourait en même temps que s'évanouissait la gloire des Espagnes, Cuba et ses richesses lui étaient ravies par l'Amérique mais un ferment intellectuel intense dotait le pays d'une pléiade d'écrivains dont la gloire ne sera jamais ternie : la "generacion del 98"..

Même si vous ne comprenez pas l'espagnol, je vous invite à écouter les notes désuètes de cette chanson que fredonnait Crescent mon père et qui m'est restée clouée en coeur
http://www.youtube.com/watch?v=nXZzKBpxaZk&NR=1

Chanson qui me ramène à cette époque presque mythique, où une propension à la nostalgie déjà chevillée en âme, m'empêchait de goûter pleinement la beauté d'un parc de la grande ville entre deux êtres aussi beaux et aimants. Pourquoi la quête effrénée du plus ou du différent nous rendent aveugles, quel que soit l'âge, aux richesses que nous offre une vie que nous devrions remercier ?
Calle del desengaño, rue du désenchantement, j'aime que d'aventure tu t'offres à moi, pour m'amener à la place du Palais Royal, où, près de l'opéra "El real", temple de la zarzuela, est évoquée la figure de Julian Gayarre le chanteur emblématique évoqué justement dans la chanson que, plus haut, je vous propose.

 

Avec papa et mamanSDC11382SDC11276

 

 

 

Il y avait bien sept ou huit ans que je n'étais revenu dans la capitale espagnole, et cet automne de lumière, pour ne pas faillir à sa réputation, allait sceller les retrouvailles d'une ville changée et fidèle avec un homme mûr toujours resté, dans un coin de lui-même, le plus profond, un petit garçon.

Vous vous doutez bien que je ne vous convie à aucun itinéraire touristique, pour grand que soient les musées et imposants les édifices de cette métropole en perpétuel bouillonnement, c'est le remue-méninges de l'ordre rigoureux des cartes brouillées, perdues et retrouvées, battues par les méandres d'une mémoire ayant intégré d'autres mémoires jusqu'à les faire siennes que je propose à votre patience.

.Retour au point de départ

Te souviens-tu de moi, quartier de Chambery ? C'est en ton coeur, au numéro 62 de la calle Garcia de Paredes, que je passai ma petite enfance, avant qu'Henriette la Française, ma mère, ne "rapatrie" mari et enfants dans son pays.
Tu me restitues "ma" rue telle qu'elle a toujours été du plus loin de mes souvenirs d'enfant à ceux entretenus par les régulières visites que je te rendais, la voie qui prend naissance sur l'imposant "Paseo de la Castellana" se détourne immédiatement des trépidations de cette voie quartier d'affaires pour, entre commerces "de bon ton" et imposantes portes d'entrée, nous conduire à la façade néo-gothique de la Milagrosa presqu'en face de chez moi ; ici, avant la guerre civile professaient en français les Dames de Saint-Maur, toute jeune madrilène de "bonne naissance" se devait de s'exprimer dans la langue de Voltaire. Les Dames furent balayées par les années d'atrocités et de haines fratricides ; restent les jardins oublieux des tribulations de l'histoire.
Hasard ? J'entamai à mon retour de Madrid la lecture de "Paradis inhabité" d'Ana Maria Matute où, en ces lieux mêmes, une fillette peine à se dépouiller de son enfance, me mettant encore, si besoin était, devant cette évidence : il est des êtres définitivement enfants et étrangers au monde des "autres", c'est à dire celui des adultes.

Au bout de la rue, à la station de métro Iglesias j'assiste à un office dans l'édifice où se déroulèrent tous les événements familiaux, de mon baptême aux mariages ; je ne connus aucun enterrement, à l'âge de la prime fleur votre paysage affectif ne ressemble encore pas à un cimetière.

Le temps aussi semble s'être arrêté dans le marché où la famille s'approvisionnait, les étals quelque peu revisités, il est vrai, sont toujours le théâtre de l'agitation fébrile des pourvoyeuses et les senteurs n'ont pas changé. Je ne quémande plus de friandises auprès de ma grand'mère Emilia, c'est tout.

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L'appartement est resté soixante-dix ans environ dans la famille, ma grand'mère en essuya les plâtres et l'indélicatesse d'une proche le brada récemment.
S'il était à démontrer les liens entre l'Espagne et la Flandre, la méticuleuse propreté du vestibule de l'immeuble en serait la preuve éclatante. Les marbres brillent et les cuivres scintillent mais plus aucune boîte à lettres ne porte notre patronyme.
La courbe si pure de la cage d'escalier est toujours d'une blancheur aussi nivéenne mais je n'ai pas osé emprunter l'ascenseur qui lui fait face, je suis finalement intimidé en pays de connaissance.
Je pars rassuré par la pérennité des lieux restés intacts mais un petit ver s'est introduit dans la pomme qui me dit que je suis devenu étranger.

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Madrid des nuits dorées

En marge des grandes artères, autour de la magnifique "Plaza Real", le vieux Madrid des Bourbons évoque, n'étaient les affreux plots de nos villes, les promenades langoureuses des majas jouant avec grâce et rouerie de leurs éventails sous l'oeil des "protecteurs" enroulés dans leurs capes.

L'ancienne mairie du seizième siècle est désertée, le maire actuel de Madrid ayant opté pour un transfert dans un édifice plus somptueux, nous le verrons. Le bâtiment triomphe de cette désaffection par sa certitude qu'en son coeur battent les plus nobles pulsations de la ville capitale.

Dominant l'industrieuse "Gran Via", le phénix emblématique s'élance dans un ciel complice qui lui fait don de son immense manteau sombre, l'immeuble "Metropolis" enchantait déja mes premières années..

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Au centre du Madrid moderne, deux édifices se partagent la vedette, le palais des ducs de Linares, inauguré en 1900 après 18 ans de travaux ; le somptueux édifice était le don d'amour d'un marquis à son épouse adorée qui se révéla être sa demi-soeur, le père n'était pas un parangon de fidélité, la maman de la dulcinée non plus, soit dit en passant.
On dit le palais hanté bien que le duc et la duchesse, fervents catholiques, obtinrent l'autorisation papale de vivre sous le même toit mais dans des appartements séparés, il y aurait eu une enfant du pêché mystérieusement disparue.
L'immeuble, heureusement classé en 1970, a échappé à la démolition comme la plupart des "palacetes" de la Castellana remplacés par des sièges sociaux aux audaces indigentes et pharaoniques des firmes internationales, il est actuellement Maison d'Amérique et les splendeurs de ses intérieurs se visitent, cependant aucune photographie n'est autorisée.
L'autre édifice, celui que je vous présente ici, "La Telefonica" ou ancienne poste centrale, a attiré les convoitises du maire de la capitale qui y a justement établi sa mairie en lieu et place de l'ancien hôtel de ville, je reconnais les guichets et les lutrins de marbre désormais inutiles, mais la montée aux terrasses vous offre une vie sur la capitale à couper le souffle.

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Quelques rencontres

Pour qui aime observer, la rue ménage sans répit des rencontres poétiques ou insolites, ainsi ces ouvriers rénovant une façade Art-Nouveau sous une gaze rose qui, par magie, donne une légèreté de rêve à la rude tâche.
Une très jolie jeune femme rêve sur un banc de pierre, oh pas pour longtemps, un galant aux cheveux de neige viendra au rendez-vous et, sans s'occuper le moins du monde des passants, la demoiselle et le barbon s'embrassent goulûement avant de s'éloigner, heureux et légers, la main dans la main.
Un soir, dans un quartier de restaurants un voleur de poubelles est surpris par mon objectif.

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Plaza Santa Ana, Federico Garcia Lorca qui mourut victime de la bêtise et de l'intolérance nous offre l'envol de son âme vers une paix que son siècle lui refusa.
Et comment parler de Madrid sans évoquer les devantures de magasins constituées de pittoresques carreaux de céramique, les "azulejos" évoquant des scènes de rêve ou populaires qui perpétuent nos émerveillements de gosses.

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Au revoir Madrid

Avant de quitter la ville, je voudrais rendre hommage à la joie de vivre qui, malgré la violence de la crise économique, n'a pas remisé les plaisirs traditionnelles des tournées de bars à vin à la mode et des tavernes à "tapas" de toujours.
La rue n'est pas morose, le service dans les établissements est attentif, souriant et professionnel, les rires fusent et les conversations animées colorent d'un air de fête les nuits madrilènes.
Nos hôtes Victor et JuanMa nous ont cornaqués avec une maestria affectueuse aussi touchante qu'efficace ; le premier vin dans cette auberge tradtionnelle ou cet autre dans ce bar à vin à la mode ont ravi nos papilles par des saveurs méconnues, connaissez-vous l'incroyable Pedro Ximénez ? une robe de velours sombre recélant des douceurs liquoreuses totalement inattendues.
Et, bien sûr, pérenne et inchangée, la brasserie Gijon qui fut de tous temps l'abri de l'intelligentsia hostile à la dictature, les clients désargentés payaient leurs consommations de leurs oeuvres.

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Le ciel de la dernière nuit nous fixe de sa pupille de lune ourlée des ors de l'automne.

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Il y aurait encore tant à dire, mais cela dépasserait le cadre d'un simple billet, peut-être déjà trop long, mais il y aura une suite, moins subjective autour de deux musées.
A bientôt

 

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Commentaires
H
@ Clairette : Mais, chiche !
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C
Quel beau texte ! J'ai envie de retourner à Madrid dans tes pas...
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H
@ Viane : Comme "Volver" enveloppe ma page avec justesse, mon ami.<br /> <br /> Muchas gracias de dar mas colores a mis palabras.
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V
Al leerte suena " volver" con la voz de Gardel ... <br /> <br /> También algunos recuerdos ibericòs, imagenes escondidas de otros tiempos pero tan claras, como si fueran mas reales que las ultimas fotos <br /> <br /> Feliz año nuevo y mucho cariño Amigo <br /> <br /> "Volver... con la frente marchita,<br /> <br /> las nieves del tiempo blanquearon mi sien...<br /> <br /> Sentir... que es un soplo la vida,<br /> <br /> que veinte años no es nada,<br /> <br /> que febril la mirada, errante en las sombras,<br /> <br /> te busca y te nombra.<br /> <br /> Vivir... con el alma aferrada<br /> <br /> a un dulce recuerdo<br /> <br /> que lloro otra vez."
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H
@ Laura : tes mots me touchent tellement...<br /> <br /> Non, rien d'autre, je ne trouve rien d'autre à dire. Merci.
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