Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Le blog de HP
27 août 2009

Un été

DEMOLITION

A la veille de quitter Charmes, où je ne reviendrai plus qu'épisodiquement jusqu'à la prochaine belle saison, je me retourne en arrière et m'interroge sur cet été 2009, mon premier été d'orphelin.

N'ayant pas d'enfants je ne m'inscris plus dans aucune verticalité, ma lignée ne s'étale plus qu'horizontalement, j'ai perdu l'ascendant et n'ai pas de descendants. Je suis une branche sans fruits, j'aboutis sur le néant. Avant le départ d'Henriette cette évidence ne m'était jamais apparue.
Mais ne dramatisons rien, à défaut de procréer j'aurais tissé tous ces liens qui justifient une vie...

Juillet 2009, une semaine à Bordeaux, saccager l'appartement de maman, le vider, trier, recevoir le coup de poing de tel corsage jaune qu'elle avait tant aimé en cet été 2002 et qui me saute à la figure avec la violence d'un "jamais plus". Ce corsage je l'ai gardé. Je deviens fétichiste, fleuris les portraits et vénère des reliques. Dérisoire attachement aux vestiges matériels de celle qui fut. Comme le sillage des navires coulés qui livrent les épaves rendues par la mer. Vertige des "Titanic" de l'âme.

Dans l'appartement les plantes qui l'occupaient tant se meurent de son absence et de ce qu'elle leur disait car elle savait parler aux végétaux. Comment ai-je pu si souvent lui reprocher d'encombrer la maison de "laitues" qui transformaient les déambulations d'une pièce à l'autre en aventure ondoyante sur cette carte du Vert.
Les pampres du Bordelais, eux, promettent de généreuses récoltes et, au détour d'un chemin de terre, une épave agricole, idole des non-retours élance son imprécation muette aux cieux.

SDC10230SDC10204

SDC10219

RE-CONSTRUCTION

Un camion est venu, conduit par mon neveu Claude, chargé des objets de là-bas qui désormais vivent à Charmes, il a fallu déplacer et intégrer, et voilà, dans la chambre des iris le mobilier de mon adolescence y compris le lit où je dormais toujours quand je venais "chez moi", c'est à dire chez eux d'abord, chez elle ensuite a pris place. Mobilier assez commun, mais riche de tant de souvenirs...
Ce guéridon qui l'accompagna dans ses multiples déménagements s'est lové dans un angle du salon et cet étrange samovar japonisant dont elle ne se servit jamais orne de son inutilité ventrue la pièce voisine.

SDC10286SDC10246

SDC10300

Il y a aussi la trouvaille de cette photographie d'un couple qui fut si beau...

SDC10404

L'ÉVENEMENT

La petite église de Charmes en l'Angle, le neuf août,  a été le théâtre, pour la deuxième année consécutive, de la célébration annuelle de la messe.
Que j'aime voir la minuscule commune reprendre vie à cette occasion ; sous un soleil joyeux les paroissiens se congratulent après l'office, et une cinquantaine de personnes est conviée à la maison pour un lunch champêtre.
Bruno, l'officiant, fait l'unanimité et je pense que personne, même les incroyants les plus obstinés, ne sauraient plus manquer cette journée de franche et heureuse sociabilité.
Certains sont venus de très loin, l'ami de Madrid, Victor articule ses vacances d'été autour de cette messe et l'adorable famille Vian, originaire de Charmes et vivant à l'île maurice était là également.
Sous l'effet de la chaleur et du vin ma cravate est jetée aux orties et je peux jouer avec Chitan à un point tel que nous finissons par nous endormir sur l'herbe dans les bras l'un de l'autre bercés par le brouhaha des convives.

DSCN0705 DSC03182

DSC03093

SUR UN AIR DE CLARINETTE

L'arrivée de ma nièce Fabienne et son mari Joël accompagnés des enfants Guillaume et Matthieu a continué à donner de la vie aux lieux.
Par un feu d'artifice, Charles et moi avons voulu offrir un souvenir particulier aux jeunes visiteurs ;  Matthieu  nous a gratifié d'un charmant concert de clarinette goûté avec recueillement jusqu'au moment où, malicieux, il a émis les notes de la Marseillaise sous le portrait de Marie-Antoinette.
On est toujours trahi par les siens.
Le soleil continue à darder, il n'a pas plu depuis longtemps, Charles s'échine à arroser fleurs et légumes et, dans l'étang si bas, les carpes croisent à fleur d'eau. L'herbe est jaune et les feuilles du tulipier de Virginie se recroquevillent pour offrir moins de surface aux rayons brûlants.

P1060653P1060762

P1060592

Et puis la maison est restée vide, je reste seul avec Belle et Chitan, c'est à dire en bonne compagnie, mes arbres aussi me racontent leurs descentes chtoniennes et leurs élans vers le ciel, pérennes ils portent en eux tant d'histoires que le regard qu'on leur donne ne peut être qu'interrogateur.
Je n'ai pas jeté les bouquets de fleurs, je les laisse faner doucement, demain, avant mon départ ils seront jetés, leur vie éphémère aura cependant laissé de belles couleurs dans les mémoires.

SDC10302

Ce fut un bel été.
Enfin peut-être...
L'été d'une grande perte et l'été de beaucoup d'affection.
En tout cas, ce fut un été très chaud.

Publicité
Commentaires
L
Cher Henri Pierre,<br /> Je sais combien il est dur de rassembler, de trier de pareils évènements de la vie de ceux qui nous sont chers, et qui ne se reflètent plus que par des choses infimes si ce n'est ce qu'ils laissent en nos coeurs... Le fait de ne pas avoir de descendance, il est clair pour ceux qui comme nous se trouve en cet état de fait..doivent accomplir ce que tu accomplis le relais de ta sensibilité, de ton affection...et je dirai même de l'amour que tu déploies..!! Biz HP
Répondre
H
@ Ghislaine : Et si n'être ni "enfant de" ni "parent de" était tout simplement la condamnation à âtre soi-même ?<br /> Et si cet été que tu hais était la traversée du tunnel t'amenant à un toi plus fort ? L'été prochain te sera doux, et de cela j'en suis convaincu, certain. Tu sais, je suis un peu sorcier...<br /> Comme je t'aime, je t'embrasse, très fort.<br /> <br /> @ Marie : Tu me donnes une excelente idée pour recycler mas cravates et fabriquer de délicieux martinets urticants.
Répondre
M
"Fleurs fanées, cœur aimé". Alors laisse-les finir complètement leurs jours comptés. Une cravate pour nouer un bouquet d'orties, voici qui n'est pas banal.
Répondre
M
Ne crains-tu pas que, dans un moment de rage et de folie, le couvre-lit vienne piétiner les iris ?
Répondre
G
D'enfants, mon HP, je n'ai pas non plus et n'en aurai pas parce que la seule idée de procréer et de me reproduire m'a toujours fait fuir. Oui je sais je suis une femme mais j'assume pleinement cette absence totale d'instinct.<br /> Nos enfants prennent simplement une autre forme, une apparence différente. Le seul écueil à mes yeux est que nous ne sommes pas passés, ni toi, ni moi, du statut d'"enfant de" à celui de "parent de" et c'est, entre autre, probablement ce qui rend si particulièrement cruel, pour nous, le départ de nos chers parents, départ que, pour ma part, je n'ai pas encore eu à affronter et qui me fait si peur. Il nous faut, peut-être, encore que cela ne soit guère certain, <br /> plus cruellement que d'autres vivre l'absence et apprivoiser le manque.<br /> Je suis si heureuse, si tu savais, de te voir peu à peu renaître à la vie, même si cette renaissance ne se fait pas sans douleur.<br /> Pour moi, l'été de cette année s'étire sans fin, me meurtrit, me tue. Je le hais, cet été-ci. Mais il me reste encore un soupçon de forces pour me révolter et me battre. Et puis il y a la présence de ceux, comme toi, que j'aime. Si fort.<br /> Et puis dans Rodriguez il y a Rodrigue et les Rodrigue "ont du coeur", n'est-ce pas ? ;-) Ce n'est pas moi qui l'ai dit ;-) Je finirai par t'appeler Rodrigue.<br /> Je t'embrasse fort et t'aime de même.
Répondre
Derniers commentaires
Publicité
Archives
Le blog de HP
Newsletter
Publicité