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Le blog de HP
20 mai 2008

Marrakech, Marrakechs

Marrakech dite et redite, beaucoup trop dite.
Ville "destination" des agences de voyages et des publicités. Destination vers quoi ? Ses palaces au luxe insolent et standardisé ?
Ses souks où il "faut diviser par deux" le prix annoncé ? Ah mes finauds, ça fait longtemps que les "locaux" ont adapté leurs méthodes à votre rouerie convenue...
Non, tout celà, plus les maisons d'hôte avec vue sur la Koutoubia qui pullulent à se demander si la terre entière se donne rendez-vous à Marrakech, plus les golfs qui épuisent la nappe phréatique pour le bonheur des "sportifs" au bord de la sénilité tout comme les  piscines sous les palmiers des villas cossues de la palmeraie, je vous le laisse.
Là n'est pas mon Marrakech, cette vraie cité du sud qui ne se prostitue qu'en surface mais qui garde jalousement ses vraies richesses pour qui sait voir.

Ma ville est celle d'une intimité où ombres et lumières se juxtaposent et se pénètrent en reflets fugaces toujours recommencés ; les maisons, closes en elles-mêmes, emprisonnent et tamisent les rayons d'un soleil impitoyable à l'extérieur.
Le dehors s'étourdit de bigarrures flamboyantes, l'en dedans vibre en chatoiements ombrés.
Les vitrages aux quatre couleurs fondamentales capturent la lumière dans le jeu de leurs motifs réticulés en relief et la rendent, apaisée, à l'exquise fraîcheur des pièces.

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Les angles des murs, déjà adoucis par les couches immémoriales de chaux ou de badigeon ocre, jouent avec cette luminescence estompée pour créer des volumes vaguement flous. Les ferronneries aux volutes savantes se démultiplient par leurs ombres portées.
Art de l'illusion propice à l'évocation des jnouns (génies) familiers de chaque demeure.

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Ma ville est aussi celle d'une musique restée en dehors du temps.
Musique Andalouse classique, où les accords alanguis du luth (l'aoud) s'enroulent en savantes arabesques aux sons pincés du "canoun" (sorte de cithare) tandis que les percussions (derboukka) accompagnent les ondulations serpentines du corps de la danseuse aux jupes couleur de feu où lui impriment des tressaillements qui, pour aussi suggestifs soient-ils, ne sombrent jamais dans le vulgaire.

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A ces raffinements citadins s'ajoutent les musiques régionales accompagnées aussi de leurs danses, comme celles de ces Berbères aux djellabas immaculées  ou celles, endiablées, des Gnaouas aux rites étranges, descendants d'esclaves dit'on, de garde noire des sultans raconte-t'on encore, et qui anesthésient les tympans du fracas barbare de  leurs crotales métalliques.

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Mais encore et surtout, ma ville est celle où une tradition impérissable se moque éperdument encore du nivellement des cultures ; parallèlement à la ville "bling-bling" de plus en plus indiscrète, l'élégance de la mendiante aux voiles de dentelle et aux manches écarlates renvoie nos mannequins-vedettes au rang de barboteuses, la tricoteuse au petit chat goûte l'ombre d'un parc public et me fait venir aux yeux des larmes d'émotion par l'expression de cette sereine quiétude des gens à l'âme droite ; indifférentes ces deux commères aux djellabas pastel refont leur monde comme toutes les commères du monde.

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Les Anciens, fidèles aux traditions de méditation et de port de la djellaba fuient l'animation des maisons, volières bruissantes des agitations du ménage et des pépiements des enfants , pour des espaces plus propices à leurs contemplations. D'autres, entre hommes, nous sommes en pays du sud que diantre, commentent les nouvelles du jour.

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Je demeure émerveillé par cette persistance du vrai au mépris du tourisme et de la proximité du "club med", émerveillé et, disons-le, optimiste, et ce n'est pas le sourire retrouvé de Najibou qui jettera une ombre sur ce moment de grâce.

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Commentaires
H
@ Jj : Bienvenue ici.
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J
J'ai fait un voyage puis un autre à Marrakech. <br /> <br /> La première fois, je ne connaissais pas, mais j'avais une certaine appréhension à m'y rendre, non pas que j'avais des à priori sur les marocains, loin de là, mais je suis plutôt... nordique comme garçon. J'aspire à des vacances en Finlande, en Laponie ou tout autre pays de ce genre. A notre départ de Marrakech, j'ai pleuré, je ne voulais pas rentrer dans le gris rose de la vie toulousaine.<br /> <br /> La seconde fois, deux ans après, j'y suis retourné avec une vive impatience, revoir ce que j'avais aperçu, nous avons pris notre temps, le temps d'aimer Marrakech, autrement qu'en quatrième vitesse. <br /> <br /> Quand nous y allons, nous logeons toujours au même endroit, petit hotel dans la medina... loin de cette ville qui se veut moderne pour touriste.<br /> <br /> L'an prochain, l'Autriche, faut changer, paraît il, je ne suis pas très enjoué, mais bon, ce sera peut être comme pour ma première fois au Maroc... qui sait...<br /> <br /> Merci d'être venu jeter un oeil sur mon blog, et merci du soutien,<br /> Jj<br /> <br /> L
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H
@ Viane : Nous croiser ? oui,je le souhaite de tout mon coeur, j'invoquerai si fort les j'noun que, j'en suis sûr, ils m'entendront.<br /> Marrakech a ses sortilèes et le mondre n'est pas celui de faire se rencontrer les errances convergentes.<br /> Tes regards ressemblent terriblement aux miens, il est inéluctable que le miroir mette enfin en face les deux réfléchis.<br /> A bientôt.
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V
C'est une ville où l'esprit supplée la frustration du regard . Au delà du vacarme des rues ouvertes à la circulation, oublieux de la rumeur incessante de la foule qui t'entoure, il faut entendre les bruits sourdre des portes, capturer le peu entrevu dans l'entrebaîllement des portes.Voir comme l'aveugle, aux bruits et aux odeurs.Entendre comme le sourd aux vibrations et à la voix puis, lentement,au fil des pas, dans le silence apaisant des derbs,se souvenir et inventer les lieux...les visages...les histoires. Inventer ne l'oublie pas c'est "découvrir" mais tu peux aussi rêver ce monde de derrière les murs...Tu marches dans une ville réelle mais tu déambules en fait dans un songe...Tu traverses le roman de plusieurs vies, heureuses ou tragiques car c'est aussi une ville où l'on souffre...Aucune de ces histoires n'est vraie, aucune n'est fausse...Ce rire l'as tu finalement entendu? L'eau coulait-elle réellement dans cette cour entr'aperçue ? Peu importe, si tu le crois, c'est donc vrai...Tu es le seul écrivain de la réalité de ce jour. <br /> Telles sont les clés de Ma belle Rouge... Elles sont toujours accrochées près de la porte ...Prends-les à moins que, comme je le crois, tu en aies déjà un jeu semblable au mien...Peut-être alors nous croiserons nous un jour dans le derb de mes errances...
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H
@ Michel : Que vos faims sont intenses et belles.
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