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Le blog de HP
20 juin 2007

La fin d'un monde

( Jean-Christophe retrouvera ici les traces d'une partie de l'itinéraire que nous avons suivi de concert )

16juin07__8_

Il gisait sur le bord de l'étang, son poids dans la main était infime mais son agonie m'a alourdi le coeur ; la mort, quelle qu'elle soit m'est scandaleuse.
Le dernier souffle du béjaune, ténu et quasiment inperceptible ouvre le passage de la petite vie duveteuse vers l'ailleurs.
Je déposai l'oisillon sur la branche basse d'un charme afin de le rendre, pour un certain temps, à son univers aérien.

Sensiblerie me direz-vous ? N'en croyez rien ; avec cette disparition un certain regard est irréversiblement aboli.
Plus aucun être vivant ne verra le monde comme le voyait notre fragile trépassé ; ses yeux étaient à lui, rien qu'à lui, et le peu qu'ils ont capté au cours de cette brève existence est englouti à jamais dans le néant.
C'est ce néant qui est injustifiable, ce petit volatile n'avait-il donc aucune raison d'être ?

Je suis unique, tout comme toi, tout comme vous.
Oui, je suis le centre du monde, parce que mes yeux sont au centre du monde et que je n'ai pas d'autre moyen de l'appréhender.
Pour autant que vous me soyez proche, vous ne saurez de moi que ce que mes pauvres mots vous livreront partiellement et maladroitement, ou aussi, ce que la capitalisation de  vos expériences, par le jeu de comparaisons qu'elles établissent, vous permettront de déduire.
Nous sommes tous murés dans notre unicité, beaucoup d'ouverture et de "goût des autres" peut rendre plus flous les contours de cette forteresse qui nous emprisonne à jamais.
C'est chèrement payer notre singularité.

Chaque mort est la fin d'un monde, chaque départ est une conscience évanouie.

Qu'en reste t'il ? Qu'en advient'il ? Y a t'il un sens à tout cela ?

Sereines et alanguies, ces vaches à la puissante dolence attendent leur mort programmée. Elles ne le savent pas.

20juin07_019

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Commentaires
H
@ Eva : "La mort est certainement la chose à laquelle je pense souvent,je me pose des questions, et pas de réponse.<br /> <br /> C'est troublant." (Cristina)<br /> <br /> Tes promenades à rebours en mes écrits me ramènent à ce billet qui, indépendamment de la forme, de l'écriture, clame l'inéluctable toujours d'actualité. Des oisillons il y en a eu tant et tant engloutis dans le même néant que leur petit prédécesseur d'il y a neuf ans. Et je retrouve ici ce commentaire de ma chère Cristina de Bruxelles, disparue brutalement il y a quelques années, je ne sais plus combien et ne veux pas le savoir, son blog "Alzira" lui survit, mais elle, elle avait pressenti son départ...
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E
"Je déposai l'oisillon sur la branche basse d'un charme afin de le rendre, pour un certain temps, à son univers aérien."<br /> <br /> Ce n'est pas du blablabla ça, et c'est ce petit geste, comme un rituel inventé, qui m'émeut, qui me touche... qui me touche comme tu ne peux même pas imaginer...
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J
Très beau, très intelligent et lucide texte. Je repasserai volontiers.
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J
Bien sûr, je me suis souvenu d'un certain étourneau nommé momentanément Peter Pan...<br /> Puis, le hasard n'existant pas, j'ai comparé ton texte à une des scènes du DVD que j'ai visionné hier soir, ce moment quand le futur Bouddha sort de son palais et découvre la vieillesse, la maladie, et la mort.
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M
Je ne sais pas qui montre une admiration béate à HP ! (tiens encore un point d'exclamation !)je crois qu'il n'est l'objet d'aucune béatitude ce saint homme, mais simplement des liens du sang très ténus nous unissent... Normal,mêmes gènes, même père, même mère, traits de caractère communs, notamment le désir d'éviter tout conflit et de savoir faire des concessions, sans même savoir qu'on en fait puisque c'est dans notre nature... parfois, on peut se deviner sans même se parler... Quant à l'oisillon, qu'il repose en paix, ce pauvre petit messager de réflexions philosophiques dont il ne soupçonne même pas en être l'origine. son petit cadavre nous ramène bien à la réalité de ce que nous sommes : rien, NADA ! alors, oui, il faut vivre ce que l'on peut du mieux que l'on peut. Lui, même sur la branche, il ne volera plus jamais, il engraissera un rapace ou un chat, c'est la loi implacable de la nature. Quant à nous, ne programmons rien de grâce, faisons comme les vaches, ruminons paisiblement, notre heure viendra sans nous prévenir, comme pour les autres, ceux que l'on a aimés, disparus, trop tôt ou pas, c'est d'ailleurs toujours trop tôt quand on aime... le souvenir reste, pas chez les animaux, la mère de l'oisillon ne le pleure pas, ne l'a jamais pleuré ; impertubable, elle pondra encore des oeufs et continuera jusqu'à sa propre mort poussée par l'instinct de perpétuer sa race, que nous ne possédons plus depuis longtemps. peut-être réfléchissons-nous trop ? D'où viens-je ? Qui suis-je ? Où vais-je ? Moi, je n'en sais rien et je ne veux surtout pas savoir ! Enfin, HP rassure-toi tu n'es ni Benoît XVI, ni soeur Térésa et tu ne seras jamais béatifié, tu as trop les défauts de ceux qui aiment vivre, et à ta retraite sois donc un parfait sybarite si tu le peux, même si Charmes n'est ni Sybaris ni Sodome et Gomorrhe ! les feux du ciel ne s'y abattront jamais et les petits oiseaux continueront à y mourir en paix ! Alléluia !
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