Extases dyonisiaques
I
Il a fallu que ce diablotin de Sté fasse un billet sur la bouteille de vin qu'il a dégusté, apparemment en bonne compagnie, ce week-end.
Et, vlan ! en pleine période d'abstinence ( j'entame mon sixième jour), mes sens ne sont qu'appels de rubis ou d'ambres chantant dans leur prison de verre.
Eh bien, voici donc mon chant au vin, la plus belle alchimie résultant de la rencontre des dons de la terre et de l'art de l'homme.
Tout d'abord, respecter le vin dans sa spécificité, ne pas céder à la mode lénifiante des raccourcis, style champ, bordeaux, chablis, etc.
On parle, comme au dix-huitème siècle, qui lui savait vivre, de vin de Champagne, vin de Bordeaux, vin de Tokay... Vous remarquez que par la même occasion les origines retrouvent leur majuscule.
Autre cancer qui affecte aussi nos crus : le désir de simplification et d'uniformisation des goûts.
Foin des boisages intempestifs et focalisation sur les seuls cépages. J'ai entendu dire par un français courtier en vin à Londres qu'il ne propose plus de vins français, trop compliqués, parce que les gens, en sortant du bureau, voulaient un vin immédiat, simple et sans grille à déchiffrer.
Comme si on "se jettait" un verre de vin au sortir du bureau !
Le pire c'est que par seule logique marchande, nous "boisons" à tout va en France, on pense même enlever le vocable "château" des appelations car il paraîtrait que ce mot crée de la distance et intimide.
Le miracle du vin c'est une alchimie subtile et complexe entre des cépages, un terroir avec ses contraintes climatiques et un savoir faire respectueux des saveurs qui doivent naître et fleurir de cette conjonction grâce aux vrais maîtres de chais qui savent écouter, regarder, réfléchir.
Ce sont les noces de Gé et de l'esprit humain.
Partant de là, pour celui qui prend le temps de déguster et non de boire, quel plaisir que de caresser le nectar des yeux lorsqu'il est versé dans un verre, quel bonheur de le faire délicatement osciller pour saisir le jeu des fulgurances et des puits d'ombres qui entrent alors en jeu selon les caprices de la lumière, quel délice, enfin, de le reccueillir en bouche, ne surtout pas l'avaler tout de suite, le laisser se présenter, s'affirmer, envahir et fleurir le palais tout entier avant d'aller enchanter le corps entier par l'état de grâce et de quiétude dont il nous fait don.
Tiens, histoire de ne pas finir sur une note trop "jolie" rappelez-vous le mariage de Mademoiselle Arnaud où il y a tant à dire sur l'opportunité des vins (très chers) par rapport aux mets. Et surtout, Monsieur Arnaud posant devant l'indispensable appareil à décanter le vin à la chandelle avec...
... Un vin blanc.
Comme si la transparence de la robe du vin blanc requerrait l'usage de la bougie lors de la décantation !
Vous avez envie de relire Le Bourgeois Gentilhomme ?