Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Le blog de HP
18 janvier 2006

A Michel P.

Hier j'avais des amis à dîner, la conversation et même les conversations croisées allaient bon train, quant Jean-Louis nous informe du décès de Michel Pezin dont le faire-part figurait dans Le Monde.
Cest inouï ce que l'on peut apprendre lors des dîners en ville.

Michel était chercheur au CNRS, il était spécialiste du démotique récent. Ses recherches ont toujours profité aux autres car il était d'une humilité encore plus grande que son érudition, et Dieu sait si son savoir était étendu.

Michel vivait seul à Paris, rue des Archives à l'époque où j'y habitais aussi.
Sa maman possessive et acariâtre vivait en province et, souvent, Michel qui ne conduisait pas (tiens encore un point commun) allait régulièrement la voir suivant un itinéraire mosaïque de métros, bus, trains, etc.

Michel, aussi, s'évadait parfois de Paris toujours tributaire de déplacements improbables et compliqués.
Je me souviens qu'il aimait particulièrement la grande allée de Maintenon.
C'est grâce à lui que j'ai découvert l'abbaye de Châlis, lieu privilégié près de désert d'Ermenonville et de l'île de Rousseau.

Sa maman  décédée Michel prit sa retraite, il quitta Paris pour la Bourgogne où il avait acquis une maisonnette pour y vivre en ermite en se dépouillant de tout le superflu.
Nous ne correspondions pas, il laissait au hasard le soin de retisser les liens, et, lors de ses passages à Paris le hasard ne manquait pas de provoquer la rencontre.
C'est aussi par hasard que j'ai appris sa mort, hier soir au cours d'un dîner en ville, hier...

Je garde de sa généreuse affection :
Une gravure XVIIIe siècle représentant la ville d'Antinoë (il savait ma dévotion pour le siècle d'Hadrien et Antinoüs)
Une autre gravure, scène galante de même siècle qui me fascine tant
Une énorme encyclopédie d'histoire de l'Art en je ne sais plus combien de volumes reliés de vert sombre et qui occupe tout un rayon de ma bibliothèque à la campagne.

Et puis Michel est revenu hanter ma mémoire, comme cela, fortuitement, comme nos dernières rencontres.

Je me rappelle le plaisir mêlé d'impatience lorsque nous nous croisions dans Paris, Michel, comme tous les silencieux, ne savait plus s'arrêter de parler et, au bout d'un certain temps ne venaient en tête que les prétextes que l'on pourrait trouver pour le quitter sans le blesser ;

Michel avait chez lui, à Paris, une cage d'oiseaux et un cochon d'Inde : Esaü ; lors de ses escapades il me confiait ses clefs et le soin d'aller nourrir Esaü, à cet effet il gardait dans son réfrigérateur un énorme concombre qui devait assurer les trois repas de l'animal.
Eh bien, que croyez vous qu'il arrivait ? Je ne pouvais résister à a tentation de découper une généreuse tranche de ce concombre si délicieusement frais pour satisfaire ma propre gourmandise, la part réservée au cobaye était plus légère, mais, grande âme, je lui réservais les épluchures de mon prélèvement.

C'était il y a bien longtemps, rue des Archives...

Michel, je te donne cette larme pour qu'elle scintille parmi toutes les étoiles qui hantent désormais tes espaces.

Publicité
Commentaires
H
Tes mots me touchent.<br /> Moi aussi je t'embrasse
Répondre
S
Perdre quelqu'un pour qui on avait une grande affection est toujours un passage difficile...et chacun a sa façon de gérer le deuil et le travail de mémoire...toi tu nous fais partager tes souvenirs et je découvre avec d'autres la vie de Michel P. dont jignorai l'existence jusque là...<br /> Mais par ta "voix", Michel existe encore plus plus aujourd'hui! Sa mémoire perdure et çà c'est vraiment le plus important!<br /> <br /> Je t'embrasse
Répondre
H
Merci de votre sympathie, et je donne au mot son intensité étymologique.
Répondre
B
un silence s'installe en lisant tes mots. Je n'ai pas encore eu ce genre d'expérience : perdre un ami, une connaissance proche. J'aimerais pas vivre ça. On est tous des passagers sur terre. Avec chance, on croise des gens généreux comme toi et Giorgino (et plein d'autre) Ce n'est pas la même sensibilité, mais la même générosité. Tu avais croisé MICHEL P. et tu peux lui souhaiter bonne route maintenant. Il est tout simplement parti pour un autre voyage. HP, une très forte pensée pour toi de ma part...
Répondre
G
Tu sais que mes mots ne diront jamais assez toute l'affection et la tendresse que j'ai pour toi... Aussi, sache que je suis là pour t'écouter, te lire et, j'espère, soulager ta peine. Il est des gens qui portent en eux le "pouvoir" de ne jamais laisser disparaitre les êtres croisés, rencontrés ou aimés. Tu es de ces gens là. Puisse ta larme scintiller pour l'éternité. Affectueusement. Bruno
Répondre
Derniers commentaires
Publicité
Archives
Le blog de HP
Newsletter
Publicité